Une matière première vivante
"L’histoire de la laine est intimement mêlée à celle de la tapisserie. Ses multiples vertus, la matité et la profondeur de ses tons, son élasticité au tissage et la chaleur de son aspect, en font la fibre noble par excellence." Louis-Marie Jullien, peintre cartonnier (1904-1982).
La tapisserie est affaire de fibres, et avant tout la laine, isolante, souple et résistante et surtout particulièrement adaptée à la teinture.
La laine provient de la toison de mouton. Il existe un grand nombre de races, donnant des qualités de laines très différentes en longueur, résistance et finesse des fibres. L’appellation légale "laine" recouvre également les fibres provenant d’autres animaux, tels que l’alpaga, le lama, le chameau, le lapin angora, les chèvres cachemire et angora (mohair). Mais ces laines spécialisées sont produites en quantités extrêmement limitées et généralement utilisées en mélange avec la laine de mouton.
Pour récolter la laine, il faut tondre les toisons, autrefois à l'aide de ciseaux appelés "forces" et maintenant, beaucoup plus rapidement, à la tondeuse électrique. Une toison pèse en moyenne 2 à 5 kg. L'importante quantité de graisse et d'impuretés laisse la toison d'un seul tenant. Avant de nettoyer la laine, il faut d'abord séparer la toison en fonction des différentes zones de qualité, plus ou moins fines selon leur position sur l’animal : c'est l'étape du tri.
La qualité de la laine est évaluée selon cinq critères : la résistance à la traction, la finesse des fibres, la longueur des fibres, le "crimp" (ondulation) et la couleur. Les différents lots ainsi constitués sont alors envoyés au lavage qui va traiter la laine destinée, entre autres, à être filée.
En Limousin, l'élevage ovin est traditionnel, spécialement dans la zone du Parc naturel régional de Millevaches. Le contexte textile d'Aubusson-Felletin et cette tradition d'élevage pousse de nombreux acteurs (élus, associations, producteurs, etc.) à tenter de repositionner la laine locale dans le réseau des arts textiles creusois. Si la laine reste souvent importée d'Australie et la filière ovine creusoise principalement concentrée sur la production de viande, de plus en plus d'éleveurs prennent conscience du potentiel lainier de leur exploitation.
On voit ainsi fleurir des projets destinés à favoriser la production, la transformation et l'utilisation de la laine locale. L'association LAINAMAC (Histoire de laines) agit pour une filière laine locale, notamment en médiatisant son utilisation dans les hébergements touristiques et l'écoconstruction. Elle s'est également associée avec la filature Fonty pour lancer une action originale en Creuse : la création en circuit court avec une laine de finesse unique en France, naturellement colorée, grâce à l’importation d’environ 300 brebis Mérinos noires du Portugal. LAINAMAC a mis en place un système de parrainage de troupeaux, lancé fin 2010. Le premier troupeau est arrivé en Creuse en octobre 2011 au lycée agricole d’Ahun. À terme, environ dix éleveurs permettront d’approvisionner la filature pour créer une gamme de fils de couleur sans teinture.