XVIIe siècle : le label "Manufacture royale d'Aubusson"
Au XVIIe siècle, les ateliers aubussonnais et felletinois bénéficient d’un regain d’intérêt de l’État à leur égard. Les édits royaux influent sur l’organisation de la production.
L'avènement de la Manufacture royale
En 1664, l’administration royale (à la demande du surintendant Colbert), sollicite les marchands fabricants d’Aubusson pour apporter des améliorations à la fabrication de tapisseries.
Des réunions se succèdent pour aboutir le 18 mai 1665 aux "Ordonnances et statuts des marchands, maîtres et ouvriers tapissiers de la ville d’Aubusson", confirmées par Louis XIV en juillet de la même année.
Des règles sont établies :
- Une durée minimum de 3 ans d’apprentissage, suivie de 4 ans de compagnonnage avant l’accès à la maîtrise ;
- Des "jurés gardes " sont chargés de contrôler la qualité des matières premières et des produits finis ;
- Le Roi s’engage à fournir un peintre et un teinturier à Aubusson (ce qui mettra du temps à se concrétiser) ;
- Une marque est tissée en lisière, "MRDA " pour Manufacture Royale d’Aubusson ;
- Les tapisseries doivent désormais être serties d’un liseré bleu.
Colbert ne regroupe pas les fabricants au sein d’une grande manufacture mais autorise chaque atelier d’Aubusson à inscrire en gros caractères " MANUFACTURE ROYALE DE TAPISSERIES" sur le frontispice de sa porte.
Néanmoins, les lissiers bénéficient de l’organisation correspondant au titre : la confrérie des lissiers, placée sous le patronage de la Sainte-Barbe, à l’instar de la confrérie des lissiers flamands. La fête de la Sainte-Barbe, le 4 décembre, devient un jour de festivités chômé.
Émigrations à la révocation de l'Édit de Nantes
Durant le XVIIe siècle, en quelques décennies, Aubusson et Felletin se démarquent l’une de l’autre, Felletin restant fidèle à la religion catholique tandis que beaucoup d’Aubussonnais adoptent la religion réformée.
L’Édit de Nantes, signé par Henri IV en 1598, permettait le libre exercice du protestantisme mais sa révocation par Louis XIV, le 22 octobre 1685, contraint à l’exil ceux qui refusent d’abjurer leur foi.
Tel est le destin de plus de 200 lissiers aubussonnais avec leurs familles qui gagnent la Suisse, où plusieurs s’installent dans la région de Berne, puis l'Allemagne.
À Berlin, la famille Barraband tisse des cartons provenant de Beauvais d’après des dessins des ornemanistes de Louis XIV ; près de Nuremberg, la famille Deschazeaux s’implante à Erlangen, les lissiers Claravaux et Peux à Schwabach, Mercier s’établit à Dresde.
Pour Aubusson, ce traumatisme affaiblit la production qualitativement et quantitativement durant une quarantaine d’années, jusqu’à la réforme de la Manufacture royale initiée par les pouvoirs publics dès 1726.