Christmas 1926, une tapisserie de JRR Tolkien

Deux Indications Géographiques pour le tapis et la tapisserie d'Aubusson (communiqué)

11.12.2018

"Christmas 1926": une Lettre du Père Noël pour les fêtes (communiqué)

03.12.2018
Les actus de la cité

"Christmas 1926": une Lettre du Père Noël pour les fêtes

30.11.2018

Les "tombées de métier" des tapisseries qui constituent la Tenture Tolkien, initiée en 2017 par la Cité internationale de la tapisserie en partenariat avec le Tolkien Estate, s'enchaînent au rythme de 4 par an. La fin de l'année 2018 verra le dévoilement d'une œuvre "de saison" : la première pièce issue des "Lettres du Père Noël".

Réalisée à partir d'illustrations originales de l'auteur J.R.R. Tolkien, la tenture actuellement en cours de réalisation à Aubusson prend appui sur quatre grands ensembles : Les Lettres du Père Noël (recueil de lettres écrites et illustrées par J. R. R. Tolkien), Le Hobbit, Le Seigneur des anneaux, ainsi que Le Silmarillion (publiée à titre posthume en 1977 par le fils de J. R. R. Tolkien, Christopher Tolkien), qui retrace les premiers Âges de l’univers de la Terre du Milieu, cadre des romans. Treize tapisseries murales seront ainsi réalisées. La quatorzième œuvre, Numenorean Carpet, sera réalisé au point noué.

Christmas 1926, qui tombera du métier à tisser de l'Atelier Patrick Guillot au sein de la Cité de la tapisserie le 21 décembre prochain, illustre le talent, plus confidentiel, d'un J. R. R. Tolkien extraordinaire auteur de contes pour enfants.

Les Lettres du Père Noël

Moins connues du grand public que celles issues de l'invention de la Terre du Milieu, ces œuvres figurent parmi les plus personnelles de l'auteur.

En 1920, John Tolkien, fils ainé de l’auteur alors âgé de 3 ans, reçoit une lettre venue tout droit du Pôle Nord, expédiée par le Père Noël en personne. Cette lettre lance une tradition familiale qui perdurera jusqu’en 1943, soit jusqu’aux 14 ans de Priscilla, la cadette des quatre enfants Tolkien.

Pendant près de 20 ans, chaque année au mois de décembre, le Père Noël raconte aux enfants Tolkien son quotidien et aventures, souvent les mésaventures provoquées par son premier assistant, l’ours polaire Karhu. Au fil des années, les lettres deviennent de plus en plus longues, toujours accompagnées d’une ou plusieurs illustrations. Les lettres et dessins ont été publiés pour la première fois en 1976 dans une édition préparée par Baillie Tolkien, l'épouse de Christopher.

Une série plus intimiste au sein de de la tenture

Ce premier tissage de la série des Lettres du Père Noël est marqué par une interprétation plus intimiste, conformément au caractère familial des œuvres, à l'origine destinées uniquement au cadre familial : un format plus petit, un tissage plus fin permettant plus de détails dans un format plus petit (5,5 fils au centimètre contre 4 pour les pièces précédentes). Un traitement qui invitera le spectateur à une observation plus proche, dans un rapport plus intime avec la matière et l'œuvre.

L'œuvre : un dessin à deux mains... et deux pattes

Christmas 1926, d’après Les Lettres du Père Noël de J.R.R. Tolkien, 1926, tissage en cours par l'atelier Patrick Guillot d'une tapisserie de 2,50m x 3,07m. © The Tolkien Estate Ltd 1976.

Sur les enveloppes, Tolkien dessinait un timbre représentant le Pôle Nord, pour que les Lettres soient reconnaissables du premier coup d'œil. Cette représentation du Pôle Nord est l’élément de base dans la lettre et l’illustration de 1926 : un pôle découpé par une stalagmite géante, adossé à une aurore boréale.

Cet épisode des aventures du Père Noël prend la forme d'un dialogue entre le vieil homme à la main tremblante et son espiègle assistant, dans la rédaction comme dans la réalisation du dessin.

On découvre que l'Ours du Pôle Nord a déclenché un feu d'artifice extraordinaire en allumant "deux ans d'Aurores boréales en un instant", que le Père noël dit avoir du mal à retranscrire, malgré le grand renfort de couleurs, car il lui semble "impossible de peindre la lumière qui fuse".

Puis c'est l'Ours du Pôle Nord qui prend le relai, racontant combien il s'est amusé et se croquant lui-même, hilare, observant le Père Noël lancé à la poursuite de ses rennes effrayés par l'explosion.

 

En 2019, les tissages des pièces de la Tenture Tolkien se poursuivront dans l'atelier de tapisserie hébergé au 2e étage de la Cité de la tapisserie, accessible ponctuellement au public, et les œuvres réalisées seront visibles dans les espaces d'exposition.

The Cité de la tapisserie - English presentation 2018-2019

29.11.2018
Œuvres tissées

Bilbo comes to the Huts of the Raft-elves

Bilbo comes to the Huts of the Raft-elves (Bilbo parvient aux huttes des Elfes des Radeaux)
D’après une aquarelle originale de J.R.R. Tolkien pour The Hobbit, 1937, tapisserie de 3,2 m x 2,78 m, tissage Ateliers A2 et Françoise Vernaudon, Aubusson, 2018. Collection Cité internationale de la tapisserie. © The Tolkien Estate Ltd 1937.

Le 06 avril 2018, la première tapisserie jamais créée d'après l'œuvre graphique originale du père de Bilbo Le Hobbit, J. R. R. Tolkien, était dévoilée après des mois de tissage, et entrait dans les collections de la Cité internationale de la tapisserie. Le travail des lissières de l'Atelier A2 et de l'atelier Françoise Vernaudon avait su convaincre la foule rassemblée pour la découvrir et l'œuvre avait été saluée par la Famille Tolkien. 

En découvrant Bilbo comes to the Huts of the Raft-elves, Baillie Tolkien, belle-fille du célèbre auteur et qui a été son assistante pendant les dix dernières années de sa vie, notait à quel point la tapisserie soulignait la qualité de l'œuvre de son beau-père en la transposant dans des dimensions monumentales. Elle se réjouissait de la rencontre du savoir-faire français avec l'œuvre graphique du « so British » Tolkien : « Je suis convaincue qu’il aurait été absolument ravi de cette tapisserie et du fait que des mains humaines ont travaillé maille après maille pour reproduire son œuvre. »

Retrouvez la tombée de métier en vidéo :

L'œuvre

L'aquarelle originale

C’est l’illustration préférée de Baillie Tolkien. Après leur combat avec les araignées, la troupe de hobbits se fait capturer par les Elfes de la Forêt : seul Bilbo leur échappe, grâce au pouvoir de l’anneau. Les suivant jusqu’à leurs cavernes, il finit par libérer ses compagnons et les cache dans des tonneaux de vin vides, tonneaux rejetés dans la rivière grâce à une trappe prévue à cet effet. Bilbo se cramponne à l’un des barils et tous dérivent sur la rivière, jusqu’à ce qu’ils soient récupérés par les Elfes des Radeaux qui transportent les tonneaux vides vers Bourg-du-Lac. Contrairement au texte qui fait se dérouler la scène de nuit, le jour est levé : peut-être ce soleil levant suggère-t-il la « renaissance » de la compagnie, après son enfermement au palais du roi des Elfes de la Forêt, Thranduil. Une fois encore, Tolkien se sert en expert de la gouache, en particulier pour l’eau claire autour des barils. Pour le ciel matinal brillant, il s'agit tout simplement de la couleur du papier vierge.

Le Hobbit (Extrait - Chapitre 9 « Treize tonneaux à la dérive »)

« Ainsi M. Bessac finit tout de même par arriver dans un lieu où les arbres devenaient plus clairsemés de chaque côté. Un ciel plus pâle se dessinait entre leurs cimes. Le sombre cours d’eau s’élargit soudain et rejoignit le flot généreux de la Rivière de la Forêt, arrivée en trombe des grandes portes du roi. Au milieu de cette échancrure, à la surface des eaux qui glissaient imperceptiblement, se voyaient les reflets changeants et brisés de nuages et d’étoiles. Puis le flot pressé de la Rivière de la Forêt entraîna tous les fûts et les barriques vers sa rive septentrionale, où son  cours avait sculpté une large baie. Celle-ci était ceinturée de hautes berges qui donnaient sur une plage de galets, et du côté est, un petit promontoire rocheux s’avançait jusqu’au rivage. La plupart des tonneaux s’échouèrent dans ses eaux peu profondes ; d’autres se heurtèrent à sa jetée de pierre. »

Un tissage inédit

© The Tolkien Estate Ltd 1937 / Photo Nicolas Roger

Après une semaine consacrée au montage de la chaîne sur le métier à tisser, la responsable de l’Atelier A2 France-Odile Crinière-Perrin et ses deux collaboratrices Patricia Bergeron et Aïko Konomi, toutes deux issues de la formation de lissiers, ont réceptionné les laines fournies par la Filature Terrade à Felletin et teintes spécialement pour le projet par le teinturier aubussonnais Thierry Roger. Pour éviter les disparités et créer l’unité de la tenture Tolkien, la Cité de la tapisserie a en effet choisi de fournir aux ateliers chargés des tissages les laines teintes selon les couleurs définies par le comité de tissage et qui sont communes aux différentes pièces.

Débuté au cours du mois de décembre 2017, ce premier tissage Tolkien a représenté un marathon. L'équipe s'est renforcée avec l'arrivée de la lissière Françoise Vernaudon à partir de janvier 2018. La tapisserie a été achevée début avril 2018.

Au-delà du rythme soutenu, les œuvres de la tenture Tolkien représentent un défi technique, car la manière de la tisser demande une certaine gymnastique. La définition des grands principes techniques et esthétiques des futures tapisseries a été établie en amont par le comité de tissage constitué de la cartonnière Delphine Mangeret, d’un lissier retraité référent, René Duché, et du conservateur de la Cité de la tapisserie Bruno Ythier. Le choix retenu a été de tisser comme si J. R. R. Tolkien en personne avait amené ses dessins aux ateliers d'Aubusson, c'est-à-dire en s'inspirant des réalisations des années 1930 au sein de l’École nationale d’Art décoratif d’Aubusson et en guidant les lissiers chargés des tissages selon un principe d’interprétation ancien que l’École avait remis en avant : l’usage de couleurs pures et une écriture technique très marquée en prenant modèle sur la tapisserie des XVe et XVIe siècles, peu utilisée aujourd’hui.

 

Les actus de la cité

Premières de cordée : découvrez le catalogue de l’exposition

24.10.2018

Du 17 juin au 23 septembre 2018, la Cité de la tapisserie organisait l’exposition Premières de cordée. Broderies d’artistes à l’origine de la Rénovation de la tapisserie, dédiée aux tapisseries brodées d’artistes entre 1880 et 1950. Richement illustré, le catalogue de l'exposition, Broderies d’artistes. Intimité et créativité dans les arts textiles de la fin du XIXe au milieu du XXe siècle, vous replonge dans l'histoire d'un tournant dans la création textile, pour lequel les femmes intimes des artistes ont joué un rôle décisif.

Pourquoi Aubusson, ville de tapisserie, s’intéresse-t-elle à des broderies ? C'est ce que développe Bruno Ythier, conservateur de la Cité de la tapisserie, dans son avant-propos : alors qu’à la fin du XIXe siècle la tapisserie telle que pratiquée par les Gobelins, Beauvais et Aubusson, faite de prouesses illusionnistes, n’attirait pas les artistes d'avant-garde, certains aspiraient néanmoins à une interprétation textile de leur œuvre, séduits par les techniques de la tapisserie médiévale. Leurs projets textiles vont avoir une importance décisive pour la Rénovation de la tapisserie de lisse alors souhaitée par les pouvoirs publics. À travers une sélection de 50 pièces textiles rares, l’exposition Premières de cordée explorait ainsi les origines de la Rénovation de la tapisserie au XXe siècle vers un retour à ses fondamentaux et mettait en avant les femmes restées dans l’ombre des artistes dont elles ont brodé les œuvres.

Dirigé par la commissaire scientifique de l’exposition, Danièle Véron-Denise, l’ouvrage revient sur les mots de la broderie, de ses techniques et de ses différents points, essentiels à la compréhension des œuvres présentées et de la rupture avec ce qui se faisait jusqu’alors. Ces éléments sont illustrés par de riches images de détails des œuvres.

Comment les avant-gardes artistiques de la fin du XIXe siècle ont-elles renouvelé l’art textile ? Comment ont-elles révolutionné l’esthétique de la tapisserie ? Les portraits de Maillol, Bernard, Ranson, Lurçat, Waroquier, Deltombe, Maillaud, Bissière et Pomey notamment permettent de revenir sur le contexte de création de ces œuvres en avance sur leur temps, mais aussi sur le rôle essentiel joué par les femmes du premier cercle de ces artistes.

Le catalogue répertorie l'ensemble des œuvres de l’exposition, illustrées en haute définition, regroupées pour la première fois en si grand nombre. L'ouvrage apporte ainsi un éclairage singulier sur les origines du renouveau de la tapisserie d’Aubusson au début du XXe siècle.

Broderies d’artistes. Intimité et créativité dans les arts textiles de la fin du XIXe siècle au milieu du XXe siècle, Danièle Véron-Denise, Silvana Editoriale, Milan, 2018.

Infos pratiques

Retrouvez l'ouvrage sur la boutique de la Cité de la tapisserie.

Les actus de la cité

2 nouvelles tapisseries Tolkien à découvrir à la Cité

22.10.2018

Le 5 octobre dernier étaient dévoilées deux nouvelles tapisseries de la Tenture Tolkien en présence de la belle-fille du célèbre auteur Baillie Tolkien ainsi que de son petit-fils Adam. Après une phase de finitions, les œuvres ont désormais rejoint les cimaises de la Cité de la tapisserie aux côtés de l'emblématique Bilbo comes to the Huts of the Raft-Elves.

Halls of Manwë - Taniquetil, tissée par les lissiers Olivier Baude, Christian Ceulemans, Christelle Chaises et Isabelle Gautier pour les Ateliers Pinton, et Glórund sets forth to seek Túrin réalisée par l'Atelier Patrick et Marie Guillot et Nathalie Mouveroux, ont été libérées des métiers à tisser après plusieurs mois de tissage, en présence de Baillie et Adam Tolkien. Une belle révélation, à nouveau, pour les lissiers comme pour la Famille Tolkien, qui a souhaité souligner l'importance de ce projet unique pour la mise en valeur de l'œuvre graphique de J.R.R. Tolkien :

« C’est un travail de longue haleine, de patience, et ce rendu des dessins, que j’ai vus, qui sont des aquarelles, généralement, et qui sont au format A4 maximum, de les voir rendus à cette échelle ça leur rend plus qu’hommage, ça les transfigure. » Adam Tolkien, le 5 octobre 2018.

Retrouvez les instants émouvants des tombées de métier :

 

À cette échelle, les œuvres tissées permettent une immersion inédite dans le monde magique de Tolkien, le visiteur entre dans les paysages du Silmarillion... Ces deux nouvelles pièces de la Tenture Tolkien ont pris leur place dans l'espace de présentation de l'opération "Aubusson tisse Tolkien", à découvrir jusqu'au 31 décembre au sein de la plateforme de création. 

Et en coulisses, l'aventure continue, avec le tissage de la première "Lettre du Père Noël", par l'Atelier Guillot dans l'atelier de tissage de la Cité de la tapisserie. L'atelier sera accessible à la visite le vendredi 26 octobre à 15 h, à l'occasion des Journées nationales de la laine, puis à partir du 2 novembre les vendredis et mercredis à 15h. La magie devrait opérer une nouvelle fois, le 21 décembre prochain !

 

Les actus de la cité

Le Prix Marcel Duchamp 2018 à la Cité

22.10.2018

Tout récemment récompensé du Prix Marcel Duchamp 2018, l'artiste et réalisateur Clément Cogitore travaille avec la Cité internationale de la tapisserie et l'Atelier A2 à Aubusson pour le lancement de la réalisation de sa première œuvre tissée, destinée aux collections de la Cité de la tapisserie, après plusieurs mois de préparation.

La Cité internationale de la tapisserie travaille activement pour la création contemporaine en tapisserie d'Aubusson, à travers des projets de créateurs qui comptent sur la scène française. Elle lance cet automne le tissage d'une œuvre de Clément Cogitore qui s'est vu décerner le Prix Marcel Duchamp 2018 le 15 octobre dernier au Centre Georges Pompidou, par l'Association pour la diffusion internationale de l'art français (ADIAF). Pour Bernard Blistène, directeur du Musée national d'art moderne - Centre Pompidou, "son œuvre témoigne d'un regard aigu sur les sujets les plus contemporains". Le dossier de Clément Cogitore a été défendu auprès du jury du Prix Marcel-Duchamp par Jean-Charles Vergne, directeur du FRAC Auvergne. Créé en 2000 par l’ADIAF, ouvert aux artistes français et résidant en France, le Prix Marcel Duchamp compte parmi les grands prix nationaux de référence sur la scène internationale. Il a distingué à ce jour 70 artistes et 17 lauréats. Comme l'a précisé Gilles Fuchs, président de l'ADIAF, "c'est la première fois que le Prix Marcel Duchamp consacre un artiste dont l'œuvre est souvent considérée comme appartenant au septième art".

Son regard novateur de cinéaste, son questionnement sur l'image, font sens dans le cadre de la création destinée aux collections de la Cité de la tapisserie. Cette collaboration est le fruit de la volonté du directeur de la Cité internationale de la tapisserie Emmanuel Gérard et de sa rencontre avec l'artiste dès 2013 (par l'intermédiaire de Jérémy Planchon et Camille de Bayser), ce qui a permis de mûrir le projet de tapisserie jusqu'au démarrage des travaux préparatoires en 2017.

Après Mathieu Mercier, Prix Marcel-Duchamp en 2003, Eva Nielsen, ou encore Jean-Baptiste Bernadet pour la collection "Carré d'Aubusson", ce projet est révélateur de l'intérêt grandissant du monde de l'art contemporain pour la tapisserie, considérée comme un medium à part entière dans le travail pluri-media des artistes de la jeune scène contemporaine.

Des captures d'écran à la matérialité du tissage

Pour son projet de tapisserie, Clément Cogitore puise son inspiration dans les images d’actualités des émeutes de 2011 sur la place Tahrir au Caire, en Égypte.

« Ce projet s’inscrit dans la lignée de mon travail autour d’images très peu définies, circulant en réseau suscitant récits, croyances ou superstition chez le regardeur par son absence de détails. Par le manque d’information qu’elle communique, l’image devient alors un support de projection de l’imaginaire du spectateur, ouverte à tous les possibles. »

Travaillant à partir de captures d’écran très agrandies, Clément Cogitore s’intéresse aux relations entre l’image numérique et la tapisserie dans leur rapport commun au pixel. La découverte des savoir-faire, des techniques propres à la tapisserie, a été envisagée comme un temps préparatoire essentiel à la création de la maquette.

La création de cette maquette et la mise au point du carton a ainsi représenté l'aboutissement d'un process de maturation du projet de tissage, mis en place par la Cité de la tapisserie dans le cadre des créations contemporaines : un long travail d'itération, d'échanges entre Clément Cogitore et le comité de tissage constitué par Bruno Ythier, conservateur de la Cité de la tapisserie et Delphine Mangeret, cartonnière, avec le concours des lissiers retraités, Alain Chanard et René Duché, afin de déterminer les choix de couleurs et de matières, de définir le "grain" de la future tapisserie (le calibre du tissage). L'enjeu technique consiste à interpréter une image numérique très peu définie, si compressée que les détails en sont absents, et de la traduire en un tissage assez large, donnant une présence forte au textile, dans des dimensions importantes : 5 x 2 m.

La Cité de la tapisserie a lancé un appel d'offres auprès des ateliers de la région d'Aubusson-Felletin en s'appuyant sur un cahier des charges précis. C'est l'échantillon de l'Atelier A2, dirigé par France-Odile Perrin-Crinière à Aubusson, qui a su convaincre l'artiste et le jury de la Cité de la tapisserie. Artiste et lissières travaillent ensemble au calage du tissage. L'œuvre ne sera ensuite révélée qu'au printemps prochain dans le cadre d'une installation de l'artiste au sein de la Cité de la tapisserie.

Né en 1983 à Colmar, Clément Cogitore vit et travaille à Paris. Il est représenté par la Galerie Eva Hober (Paris) et la Galerie Reinhard Hauff (Stuttgart).

Après des études à l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg et au Fresnoy-Studio national des arts contemporains, Clément Cogitore développe une pratique à mi-chemin entre cinéma et art contemporain. Mêlant films, vidéos, installations et photographies, son travail questionne les modalités de cohabitation des hommes avec leurs images, il y est question de rituels, de mémoire collective, de figuration du sacré...

Clément Cogitore a été récompensé en 2011 par le Grand prix du Salon de Montrouge, puis nommé pour l’année 2012 pensionnaire de l’Académie de France à Rome-Villa Médicis. En 2015 son premier long-métrage Ni le ciel, Ni la terre a été récompensé par le Prix de la Fondation Gan au Festival de Cannes – Semaine de la critique. Il a été nommé aux Césars 2016 dans la catégorie Premier film. Il a obtenu en 2016 le Prix Sciences Po pour l’art contemporain, ainsi que le Prix de la Fondation Ricard : deux de ses œuvres ont ainsi été sélectionnées pour intégrer la collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne. Son travail a été exposé à l’été 2016 au Palais de Tokyo. Premier lauréat du Prix le BAL de la Jeune Création avec l’ADAGP pour Braguino ou La communauté impossible, ce projet lui a également valu la mention spéciale du Grand Prix de la compétition internationale du FIDMarseille en juillet 2017. Enfin, nommé aux côtés des artistes Mohammed Bourouissa, Thu Van Tran et Marie Voignier, Clément Cogitore a remporté le Prix Marcel-Duchamp 2018, le 15 octobre dernier.

L'acquisition de la maquette de Clément Cogitore, qui intègre ainsi les collections "Musée de France" de la Cité de la tapisserie, est soutenue par la Fondation d'entreprise AG2R La Mondiale pour la vitalité artistique. Cette fondation d'entreprise dédiée au mécénat culturel s'engage en faveur des territoires, pour la préservation du patrimoine culturel régional, matériel et immatériel, la valorisation de la création contemporaine, ainsi que la promotion des métiers d’art.

 

 

Les actus de la cité

Un manteau pour la collection "Aubusson tisse la mode"

17.10.2018

La tapisserie est un "tissu" utilisé de tout temps pour habiller les corps avant même les murs... Inspirer les créateurs de mode pour créer une collection de vêtement et accessoires de mode, tels étaient les objectifs de l’appel à projet de la Cité de la tapisserie « Aubusson tisse la mode » lancé en 2015, et qui avait récompensé 6 créateurs. Une nouvelle pièce de cette collection "mode" vient d'être révélée en présence de sa créatrice Capucine Bonneterre.

Nécessitant un travail important de recherche et d'adaptation à travers les échanges entre les artistes et les lissiers, les tissages des six pièces lauréates se succèdent. Les deux premières pièces lauréates, le Blouson Teddy de Christine Phung et Libramen Forma de Prisca Vilsbol et Dagmar Kestner sont tombées du métier au printemps 2018. Le 15 octobre dernier ce fut le tour du manteau japonisant de Capucine Bonneterre, réalisé par la jeune lissière Aiko Konomi de l'Atelier A2.

Pour créer cet élégant manteau, Capucine Bonneterre s'est appuyée sur le principe d'une pièce tissée d'un seul tenant, entièrement pensée en tapisserie. Elle a également souhaité mettre en avant l'analogie entre les "relais" – interruptions du tissage qui permettent les changements de couleurs – et le principe de la boutonnière. Assemblé sans coutures de finitions, par un système de pliage puis maintenu en place par le laçage et le tressage du réseau de boutonnières, le manteau, réversible, peut être porté d'une multitude de façons et donne à voir la matérialité de la tapisserie en présentant certaines parties de son envers foisonnant.

Pour sa réalisation, c'est une véritable collaboration qui s'est mise en place entre l'Atelier A2 et l'artiste, pour expérimenter pas à pas une réalisation sur mesure : tout d'abord l'emploi d'une chaîne de laine afin de préserver la souplesse du vêtement, mais également pour l'agencement en motifs des couleurs de laine et de soie obtenues en teinture naturelle. Jeux de battages et de lumières, entre soies brillantes et laines mates, cette pièce délicate est résolument "tapisserie", entièrement pensée pour éviter l'intervention d'un autre façonnier. Après avoir libéré la tapisserie du métier à tisser, les lissières et la créatrice s'attèlent aux finitions et à l'assemblage du vêtement : rentrer, sur les bordures, chaque fil de chaîne dans la trame, puis assembler les centaines de boutonnières, grâce au système de liens et de ceintures tissés.